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2015-04-06

Pâquerette


Ah ! Jolies pâquerettes de la pelouse, qui jouaient avec les primevères et que le jardinier a coupé les têtes et juste avant Pâques…

mais déjà quelques fleurettes pointent leur tête faisant la nique au jardinier,,. car elles ont la particularité de survivre aux tontes répétées, même très rases dans un gazon, d’où l’expression un peu triste :

                        au ras des pâquerettes

expression signifiant au ras du sol, sans intelligence… Quelle injustice pour elles, qui expriment une grande générosité, puisqu’on les étête sans vergogne et qu’elles repointent le bout de leur nez aussi vite.
Au ras des pâquerettes… cette fleur est victime de la langue française qui se sert des métaphores de la hauteur pour parler des choses de qualité. Ainsi une chose importante et de bon niveau sera dite « haute » à l’inverse de quelque chose de médiocre qui sera dite « basse ». Au XVIe siècle, on disait même « ras terre avec les pâquerettes » et au XVIIIe siècle « à ras de terre avec les pâquerettes ». On a supprimé la terre, mais le caractère médiocre, banal, est resté .

Même Alain Souchon n’a pas résisté à cette expression, puisqu’il en a fait le titre d’une chanson :
 

Pourtant…
Dans les misérables, Victor Hugo a écrit :
"Elle effeuillait une pâquerette. Elle maniait cette fleur, d’instinct, innocemment, sans se douter qu’effeuiller une pâquerette, c’est éplucher un cœur. »

Moi, j’effeuille les marguerites… je t’aime, un peu, beaucoup, passionnément…
 
Si on l’appelle pâquerette , c’est sans aucun doute qu’elle est liée au printemps, à Pâques, au moment où on en voit le plus. Pourtant elle est présente toute l’année, tant elle est rustique… Dans le calendrier républicain français, le jour de la Pâquerette est le 24e jour du mois de Ventôse… fin mars comme Pâques bien souvent…

« à la vue de plusieurs touffes de pâquerettes et de quelques boutons d’or épargné par les premières gelées blanches, la Goualeuse ne put retenir de nouvelles exclamations de plaisir »… Eugène Sue dans Les mystères de Paris 1843

Dans son «Dictionnaire étymologique, critique, historique et anecdotique de la langue française », François Noël indique une autre origine que la fête de Pâques. Pâquerette s’appelait pasquierette en ancien français et vient du mot pasquier, pasquis, pâturage avec le suffixe –ette (petit) et donc son nom serait accordé à cette fleur, parce qu’elle parsème nos prairies.

« Le pré semblait s’être fleuri soudain de nappes neigeuses de pâquerettes » Émile Zola dans « Le Rêve » 1888

Elles ont la particularité, comme certaines autres fleurs, de se fermer la nuit et de s’ouvrir le matin pour s’épanouir au soleil. Ainsi elles pratiquent la salutation au soleil de manière instinctive et on dit qu’elles seraient sans intelligence ?
 
Les conventions internationales l’appellent « bellis perennis »…Bellis ? Elle serait du genre belliqueux, la petite pâquerette ? Sans doute, pour survivre à tous les coupeurs de tête...
mais les Anglais l’appellent Daisy comme la compagne de Donald ou la princesse de l’univers de Mario… les Allemands : Gänseblümchen » : toute petite fleur ou « Marienblume » : fleur de Marie, fleur de la Terre Mère et les Turcs d’un nom délicieux : papatya

et pour finir j’aurais envie de partager avec ceux qui le désirent un conte de Hans Andersen, La pâquerette , histoire de l’une d’elles, heureuse de son sort, amoureuse d’une alouette…